L’annonce d’une mort arrive toujours comme une météorite. Lorsqu’elle survient dans une auberge de jeunesse, un matin d’électro à plein tube, s’y ajoute une couleur surréaliste qui ébranle les certitudes. Le monde est si vaste ; or il semble soudain rétrécir, comme un décor de carton.
L’encre n’a guère coulé, depuis une semaine, le temps de laisser passer la vie dans les jours condensés. Au mitan du voyage, plus ou moins, entre la visite du père et l’inconnu qui s’ouvre à nouveau. La parenthèse familiale refermée, on se surprend à découvrir la solitude, entre les bus verts et bleus de la longue ville de Quito.
Parfois la machine s’arrête, ou tremblote, il ne sert à rien de forcer, mieux vaut relever la tête, siroter une infusion de coca, et regarder, un moment, les nuages. Puis laisser la route reprendre les commandes, au rythme qui lui chante, tandis qu’on fredonne en souriant, en souriant parce qu’on a déjà fait découvrir l’Atlantique à un ami, parce qu’on a déjà tant couru le long des vagues, parce que tous les visages font, déjà, une trace lumineuse derrière soi, juste derrière soi, assez pour éclairer le chemin.
La Patagonie se rapproche, et s’éloigne à la fois. Chaque nid de poule monte presque à la tête, comme un battement de cœur, et on ne peut, à nouveau, que sourire, et penser aux mots d’Albert Camus, surtout dans l’ombre du cratère : « Chacun des grains de cette pierre, chaque éclat minéral de cette montagne pleine de nuit, à lui seul forme un monde. » Et on se surprend à serrer le poing, parce que, tiens, oui, on est vivant…
Je dédie cette pensée à ma tante, Michèle, qui est subitement partie le 17 janvier 2013, dans sa 66ème année.